Pourquoi Standard chartered Bank a échoué en Côte d’Ivoire ?

 

J’ai connu standard Chartered Bank à la suite d’une déception profonde et aigue qui a failli me faire rater tout un projet d’investissement. Généralement les entrepreneurs créent des comptes dans des zones de conforts qui leurs permettent de ne pas se retrouver dans des situations compliquées en cas de difficulté lorsque leur lieu où est domicilié leur compte est affecté, en d’autre terme certains diront des comptes offshores. A la différence des autre qui envoient ailleurs leur richesse, je décide de faire l’effet inverse, mon compte offshore, je la créé au pays en Côte d’Ivoire.

Je préparais un voyage sur Abidjan et l’un de mes objectifs était de créer un compte bancaire afin de faciliter mes transactions au pays, étant donné que j’ai déjà un compte bancaire au pays avant de partir, je rentre en contact avec ma banque, je prends rendez-vous avec le gestionnaire de compte 6 mois avant, je dis bien six mois avant. A ma grande déception, le gestionnaire de compte à simplement ignoré le rendez-vous, il n’a pas traité mon cas et est parti en vacance sans transmettre mon dossier à son intérimaire, le comble, c’est qu’il ferme son téléphone et restera injoignable. C’est ainsi que je mis un terme avec mon ancienne banque en clôturant le compte définitivement.

Suite à cette déception, j’ai rencontré un ami et frère qui me conseille la banque 100% digitale, Standard Chartered Bank, je me rends aussitôt sur le site, je télécharge l’application et rapidement je crée mon compte, quelques jours après un agent du service courrier de la poste vient me rendre ma carte bancaire et quelques documents. Je dévore donc les services de la banque avec appétit. Je suis devenu un vrai ambassadeur de la banque dans mon environnement, j’ai toujours conseillé cette banque à tous mes proches.

Standard chartered bank a-t-elle trop osé dans un environnement hostile à la digitalisation ?

Dans un environnement où les personnes sont habituées aux contactes physique avec les agents de banque, voici une banque anglaise qui vient avec une nouvelle façon d’opérer les services bancaires. Il faudra faire signalé ici que Standard a un modèle complètement différent des autres Banques, tout son système repose en grande partie sur les services mobiles money, cette banque n’a pratiquement pas de guichet.

Standard mise donc sur l’ensemble des points de retrait mobile money pour satisfaire ses clients, je pense que c’est une très belle innovation, en ce sens que la plus part des citoyens ont un compte mobile money et d’ailleurs c’est une longueur d’avance. Pour les opérations courantes de retrait et de crédit de compte (dépôt), les clients ont recours à leur application de Banking liée à un compte mobile money, du compte mobile, le client peut transférer son argent sur son compte bancaire et par la même occasion il peut également transférer de son compte bancaire à un compte mobile money. Cette façon d’opérer dégage énormément l’affluence pléthorique observée dans les banques. Pour une opération d’un certain montant jugé trop élevé, le client peut se rendre dans une agence. Le système est bien pensé afin de rendre de client à l’aise et autonome. Dans un système anglais on dira self-service.

Pourquoi Standard a-t-elle échoué ?

Je précise ici que Standard n’est pas dans une situation de catastrophe, ni en faillite. La banque a obtenu d’excellent résultats et une bonne progression depuis qu’elle a intégré l’écosystème bancaire Ivoirien.

J’ai pu analyser les difficultés de la banque sous différents angles. Selon mon observation en tant que client de la banque et une enquête de routine réalisée personnellement. Je vous livre ici mes résultats.

  • L’échec de la relation banque – mobile money

Les transactions habituelles avec la banque se sont arrêtées du jour au lendemain au grand désarrois des clients. Cet incident eu lieu juste avant le dernier trimestre de l’année 2021, ça été un coup dur pour l’ensemble des clients de cette banque. Selon Standard, c’est une erreur technique, et elle sera résolue le plus rapidement possible et que les équipes sont à pied d’œuvre pour décanter la situation. Situation qui restera éperdument « indécantable » jusqu’à ce jour, si je ne me trompe. Je saisi l’occasion d’interpeller le service des relations afin de nous apporter des clarifications à cette situation de blocus, malheureusement aucune clarification n’a pu véritablement me convaincre car l’attente se faisait trop longue pour un bug technique qui devait être réglé le plus rapidement.

La vraie raison de la rupture est une question de consensus, Standard a osé placé aveuglement le cœur de son business dans les mains d’opérateurs mobiles qui sont devenus indirectement des concurrents des banques à travers les services financiers mobile money et mobile banking. Nous nous sommes vue du jour au lendemain restreint d’opération via le service mobile money, tous les services mobiles money affiliés à elle ne s’affichent plus sur nos interfaces, aucune possibilité d’approvisionner désormais nos comptes, pire encore les guichet Standard sont quasiment inexistantes dans l’environnement national.

Il faudrait relever que les services de transaction de la banque vers les comptes mobiles money étaient gratuits, par contre, les transactions inverses étaient facturées par les opérateurs mobiles. Je doute bien fort que ça soit la brouille de la rupture. La rupture restera ainsi et finira par affaiblir la banque, désormais les clients se retrouvent dans les vieilles habitudes de queue pour les opérations bancaires. Il faudra localiser les guichets rares et passer pour son opération de dépôt, une tâche bien pénible et insupportable. Nous voici désormais à la case départ.

Cette situation que j’ai particulièrement observée m’a donc permis de prendre mes garde-fou afin de ne plus dépendre d’elle, c’est un nouveau coup dure pour moi.

  • Un système trop moderne pour les clients

J’ai eu l’occasion d’interroger des personnes afin de connaitre ce qu’elles pensent d’un système bancaire 100% digital. La plupart d’entre elles ont favorablement accueilli l’idée et trouve qu’une banque qui élimine les souffrances qu’on connait en milieu bancaire restera la meilleure banque. Et c’est bien évidemment le problème que résout Standard Chartered bank.

Dans mon enquête, j’ai pu analyser que malgré l’acceptation du principe du self-service, les personnes restent sur leurs gardes et font très attention. Il est vrai que Standard propose un service 100% digital mais la rupture est beaucoup trop violente et ne s’adapte pas à l’environnement. Mes interlocuteurs m’ont dit simplement que :

« Nous sommes habitués à donner notre argent à des banquiers physiquement ce qui nous donne la garantie que notre argent se trouve entre de bonne main, mettre son argent dans une machine et la machine crédite le compte est trop risqué, à qui donc se plaindre en cas de problème ? »

Nous pouvons comprendre clairement que le modèle de Standard est bien apprécié mais ne s’adapte pas totalement à notre environnement.

 

Que devait-elle faire pour s’adapter ?

Toute rupture implique beaucoup de risques mais au final les résultats s’observent au bout de l’effort. Certes le modèle 100% digital marche très bien ailleurs, mais malheureusement ne s’adapte pas à notre réalité.

Je pense clairement que Standard a été trop prétentieux dans un milieu où les habitudes traditionnelles sont encore dans l’ADN de la population. Il serait intéressant que Standard s’adapte à un modèle mixte de banque et progressivement elle finira par conquérir la population. Le modèle actuel est trop sophistiqué pour une population qui préfère essentiellement les paiements cash à la livraison.

L’annonce du retrait de la banque Standard dans plusieurs pays africains ne m’a pas trop surpris, car je suis certain que pareille situation se vie un peu partout où elle s’est donc installée. Il y a des exceptions comme le Nigéria, l’Egypte, le Ghana mais il faudra reconnaitre que ce sont des pays avec un schéma clair de choix de la politique numérique dans les habitudes.

Investir en milieu africain est un art et il faut apprendre à s’adapter pour mieux s’implanter, et je suis certain que c’est pour cette même raison que la légende Didier Drogba à échouer aux élections de la Fédération Ivoirienne se Football. C’est une question de psychologie qui ne se soigne que par les hommes du terrain.

 

Que proposerait CPC Kingdom ?

Dans le cadre de nos consultations avec les clients, il nous arrive de réfléchir et de proposer des solutions complètement innovantes. Mais nous prenons toujours le soin d’acclimater nos solutions dans son environnement afin qu’elles soient bien accueillies. Si Standard Chartered nous avait contacté, nous aurions simplement fait une étude de faisabilité qui allait certainement faire ressortir les zones de faiblesses de sa solution complètement disruptive.

  • Identification du risque trop élevé

Le B2B est une belle alternative pour faire émerger des solutions qui favorisent le client et par la même occasion accélérer le développement des partenaires. L’environnement africain est à prendre en considération avec des possibles retournement de situation qui peuvent même faire fléchir tout un écosystème. La pente était trop dangereuse pour que standard se fie à elle seule. Il fallait un plan B et un plan C.

  • Un environnement trop fragile aux innovations majeures

Le coup de géant apporté par l’anglais était trop fort pour le système en place, au moment où d’autres cherchent encore des repères pour mieux s’intégrer dans le système traditionnel, voici un qui ouvre les yeux sur des habitudes toutes nouvelles et très innovantes. Standard en écartant la possibilité de s’adapter et se conformer au système traditionnel de banque, elle a simplement raté son entrée dans un système calqué sur un modèle ancien et conservateur.

  • Un modèle bancaire mixte

Certes Standard a pris la décision de partir, mais ceci pourrait servir de leçon pour d’autres banques qui lui emboiteraient le pas. La solution toute simple est le recours à un modèle bancaire mixte. Ce modèle est certainement couteux mais finira par faire ses preuves et renversera les habitudes progressivement.

Ne dit-on pas que lorsqu’on arrive dans un village et que tout le monde marche sur la tête il faut aussi en faire de même ? Un étranger a de gros yeux mais ne voit pas.

Le modèle mixte est certainement couteux pour une banque qui vient dans un système où tout est à construire, mais c’est le prix à payer. Il fallait que Standard développe son réseau de guichet en installant un peu partout des mini-agences qui n’emploieront que trois personnes au maximum. Les mini-agences seront rattachées à des agences principales. En fin de compte le plan B est ainsi créé pour bien s’intégrer. En définitive, les mini-agences peuvent être comme des agences de retrait de mobile money tout en gardant le partenariat avec les services des réseaux de télécommunications. Cette option devrait être développer dans une logique pour ne pas s’ériger en concurrence avec les services mobiles money.

 

Notre analyse pourrait donc s’étendre dans d’autres profondeurs, mais nous préférons nous en tenir qu’à ça. Si vous êtes intéressé par nos études de faisabilité nous vous prions de vous rapprocher de nous. Nous aurons beaucoup de plaisir à vous offrir une analyse intégrale et pointue qui certainement vous aidera à mieux vous orienter.

 

Merci